L'Histoire Enfant tu voulais savoir qui était ton père. Tu bassinais ta mère pour savoir. C’était ton plus grand rêve : avoir un papa. Alors maman qui en a eu marre, a dit un jour que si tu étais sage t’aurais le droit de le voir. Et t’es devenue la petite fille le plus sage du monde. Tellement que t’aurais dû être numéro 1 dans la liste du père noël. Mais à la maison on fêtait pas noël. Et puis un soir tu t’es glissée en douce dans les couloirs et par l’embrasure de la porte t’as vu un homme. Maman avait l’air embêtée de te voir mais le monsieur a dit que ce n’était pas grave. Il a posé sa main sur ta tête et t’as compris. Papa. Tu t’es dit que c’était bizarre quand même. Que la seule fois où t’enfreins la règle, papa est là.

Papa passait parfois. Surtout de nuit. T’avais le droit de le voir à condition de ne rien dire à personne. Un peu déçue t’as gardé le silence. T’étais la petite fille la plus heureuse du monde. Tellement que c’était pas grave qu’il oublie ton anniversaire. Parce qu’il est occupé papa. C’est ce que maman dit.

Puis t’as grandi et t’as fini par comprendre. Comprendre que papa a une vie ailleurs. Une femme et des enfants. Que ta mère et toi êtes des indésirables. Que ta mère vît au croché d’un homme qui finance vos dépenses en échange d’un peu d’affection. T’es la fille de ton père mais t’es surtout la fille de sa maîtresse.

Plus question d’être sage. De se taire. De jouer la comédie. Plus de papa ou de maman. Certaines activités te sont refusées par ce que « ton père n’aimerait pas ». La rage prend le dessus. Tu deviens tout ce qui pourrait leur déplaire. Un soir il t’explique que s’il pouvait il épouserait ta mère. Mais tu comprends j’ai une réputation. On ne peut pas divorcer comme ça. T’y crois qu’à moitié. Le lendemain on ouvre un compte à ton nom où l’argent coule à flot.

Ce jour-là le paternel est nommé ambassadeur du Japon à Séoul. On t’oblige à faire le déplacement. Pour fêter la victoire d’un nom écrit sur chaque ordre de virement. Et ce jour-là la colère gronde plus que les autres jours. Lorsque la nuit tombe tu t’habilles de noir et comme une guerrière tu prends tes bombes de peinture comme armes. C’est moche mais ça détend. Tu écris en gros, bien en face de sa maison, le père de la pluie. Personne ne comprendra à part lui. Un avertissement. T’existeras toujours. Tu te fais chopper par la police et plus tard ta mère se met à genou. Elle supplie de vous pardonner. Elle est pathétique. Et tu ne sais plus de ton père ou ta mère, lequel tu détestes le plus.

Cette nuit-là il pleut et tu jures de ne jamais dépendre de qui ce soit. Cette nuit tu promets que tu ne feras plus de vagues. Pas pour toi mais pour la femme qui a pleuré genoux à terre.

Et tes promesses tu les tiens.