L'Histoire
Quand est-ce que mon histoire à déraper à ce point-là ? Fixant de l’eau de ma douche qui prenait doucement une couleur écarlate, c’était la seule chose qui me venait à l’esprit. Non, ce n’était pas mon sang qui ruisselait de mes poings, de mes avants-bras. C’était bien celui d’un autre. Je serrai mes poings,  observant mes phalanges qui commençaient à porter les stigmates de ce que j’infligeais à des pauvres gens qui n’avaient rien demandé. Quand est-ce que ma vie avait-elle pu tomber aussi bas ? Bien des fois je m’étais dit que les choses auraient été plus évident si mes géniteurs n’avaient juste pas faites l’énorme connerie de me garder. Quand certaines commençaient par un père et une mère qui s’aimaient très fort et finissaient par concevoir un enfant, la mienne ressemblait plus à: Papa et maman aimaient beaucoup baiser ensemble, sauf que maman ne prenait pas vraiment la pilule et maman a fini par chier un niard. C’était une version qui était largement plus fidèle au début de ma vie. Comment je le savais ? Parce que mes cher parents biologiques s’étaient appliqué pendant toute mon enfance à me le dire. A me faire regretter mon existence même. J’étais un gars non-désiré, un parasite qui leur bouffait leur fric, cet être qui leur avait gâché la vie. Entre les paroles à chaque fois plus blessantes les unes que les autres, et les sévices physiques. L’amour ? La sécurité d’un foyer ? Non je ne connaissais pas, parce que j’étais né en Enfer. L’orphelinat fut presque plus agréable à vivre pour moi que ma vie de famille. mes parents ? Ils n’avaient jamais été des parents. C’était des gens, des démons avec qui je partageais du sang en commun, et c’était bien là que s’arrêtait nos relations. Dire que l’orphelinat fut pire ? Non ça serait mentir, rien n’était pire que mes parents biologiques. mais j’étais bien trop amer à cette époque pour vraiment m’en rendre compte. Si jeune et déjà rongé par l’amertume.Pourtant doucement les autres enfant de l'orphelinat devinrent plus ma famille que je ne l’aurais jamais pensé.

C’est à l’adoption que ma vie prit un tournant. Un bon tournant ? Pas du tout. Parce que la misère aimait la compagnie. Je pris le nom de famille de deux parfaits inconnus. Mais est-ce que cette famille était aimante ? Pas le moins du monde. Ils ne faisaient que m’ignorer, m’ignorer moi et l’autre garçon qu’ils avaient adoptés: Shin Sung. Shinsung, ce gamin qui était devenu mon frère. Faute d’avoir vraiment connu l’affection, je m’étais accroché à lui. Sans avoir même de sang en commun, ce gamin était devenu la prunelle de mes yeux. Parce que nous étions tous les deux dans le même bateaux, pris au piège avec ces “parents” qui nous ignoraient. Je n’ai jamais décidé ce qui était le pire au final, être détesté ou parfaitement ignoré. Le fait était que mon cadet et moi  n’existions pas au yeux de cette famille. Et à cette époque je n’avais pas compris pourquoi, aujourd’hui, je savais que c’était probablement pour plus toucher de fric. Alors nous avions grandis, nous étions éduqués nous-même, j’avais pris la place de l’aîné aux yeux de Shin et je devais penser à tout, parce que sinon personne ne l’aurait fait à notre place. Me retrouvant souvent à penser aux anniversaires de mon frère, mais aussi à ses Noël, vérifier son sac avant qu’il ne parte à l’école, mais aussi des fois faire à manger pour nous deux, passer derrière lui pour l’obliger à faire ses devoirs… malgré moi j’avais pris un triple rôle, celui du frère, du père et de la mère en même temps. Savait-il seulement à quel point il était important et vital à mes yeux ?

Nous n’étions que deux gamin paumés, des gamins un peu trop sauvages. Mais qui pouvait nous en vouloir ? Car aucun de nous deux n’avait vraiment appris à vivre. Nous avions seulement appris à survivre du mieux qu’on pouvait avec presque rien. Très rapidement j’avais commencé à travailler, trop rapidement pour un ado d’ailleurs? Mais encore une fois qui penserait à nous ? A nos études ? Pas nos “parents” en tout cas. La vie était une chienne et le pognon était roi. Seulement voilà, le fric avait aussi tendance à corrompre les âmes. La mienne de faisait pas exception. Parce que j'étais bien loin d’être un saint. Je m’étais doucement laissé emporté par tous les petit boulots que j’avais cumulé. Un, puis deux, puis trois. Jusqu’à même abandonner le fait de continuer mes études. Il fallait croire que rêver ce n’était pas autorisé pour moi, un peu comme le fait de dormir. C’était paradoxal, puisqu’à côté je faisais la chasse pour que Shin Sung lui n’abandonne pas ses études et qu’il continue à fréquenter les rangs des institutions. Je ne voulais pas qu’il ait à se gâcher la vie comme moi. Si moi j’étais destiné à n’avoir aucun avenir, alors je m’assurerai que lui en ait un. Pendant que moi je prenais tous les boulots qui se présentaient à moi, virant sur des zones de plus en plus sombres et acceptant de plus en plus des boulots qui flirtaient avec l’illégalité. J’avais des choses dont je n’étais pas fier loin de là. J’essayais encore malgré tout de tenir mon frère éloigné de tout ça, même si je savais que c’était mission impossible.

Mes pupilles figées sur le sol, je tardai pas à couper l’eau en constatant que celle-ci était redevenue claire. Je sortis en chopant au passage une serviette pour la nouer sur mes hanches. Je vins poser rapidement regarder mon reflet dans le miroir, puis laissais mes yeux descendre que jusqu’à mes mains. Je grimaçai un court instant, dire que c’était moi qui  regardait Shin Sung dès que je le voyais après s’être battu et complètement torché, décidément, je n’avais pas vraiment de leçon à lui donner. Dans le fond de nous deux j’étais probablement le plus hypocrite. Dire qu’en plus je lui cachais tout ça. Mes iris revinrent un instant fixer mon reflet dans le miroir; A quel instant ma vie avait dérapée à ce point-là ? La rage me montant d’un coup, je balançai mon poing contre ma propre réflexion. La douleur m’arracha une grimace et quelques secondes après un miaulement. Je me tournais légèrement, apercevant Moon sur le pas de la porte. Oubliant jusqu’à ma propre douleur, j’eus un doux sourire. Je retirais rapidement ma serviette pour l’enrouler autour de mon poing et éviter de foutre du sang de partout.  De mon bras libre je me penchais et attrapais mon chat. Je t’ai fait peur hein ? Désolé, mon bébé eut pour seule réaction de frotter sa tête affectueusement contre moi ronronnant tendrement. Et voilà, un nouveau jour d’achever, espérons que nous puissions encore survivre au prochain.