Les heures qui défilent, l’horloge au loin dans le cliquetis distinct ne trouve plus son chemin jusqu’à ses oreilles, Hwan s’oublie entre les pages des manuels et toute les informations à retenir par cœur pour les partiels qui étaient prévus dans deux semaines seulement. Ses études sont sa seule issue de secours, il avait réussi ce transfert à Busan grâce à ses notes et s’il échouait, ce serait le retour à Seoul, dans la maison familiale. L’image de la mère silencieuse et du père aux mains de fer ; un souvenir qu’il refuse de revivre, son corps s’accoutume tout doucement à ne plus ressentir la douleur des coups, malgré les marques toujours présentes, il n’y retournera pas. Et il a retrouvé Shin. C’est surement l’idée de le quitter une seconde fois qui l’achèverait le plus, ils en étaient à peine à s’apprivoiser de nouveau. Hwan ne sent pas sa tête s’alourdir et ses paupières se clore, ses nuits ont été courtes dernièrement. Les heures continuent et dehors est sombre quand il se réveille dans un sursaut. Un juron quitte ses lèvres alors qu’il range rapidement ses affaires, prêt à quitter la classe où il s’était reclus, seulement pour trouver la porte verrouiller. Évidemment. Il toque de toutes ses forces la surface en bois pour attirer l’attention de quiconque serait encore dans les parages.

Ses poings fermés glissaient contre la surface boisée de la porte, un soupir de frustration quittant ses lèvres avant qu’il ne se les mordille nerveusement. Ce n’était vraiment pas le moment pour finir coincé dans une salle de classe pendant toute la nuit, il avait encore besoin de manuels chez lui pour étudier, et parce qu’un malheur n’arrivait jamais seul, son estomac grondait pour exprimer sa famine, il n’avait pas mangé de toute la journée quasiment trop pris par ses révisions, de simples nouilles qu’il avait rapidement englouti à la cafétéria de l’université pendant une pause d’une dizaine de minutes.

Il cogne encore contre la porte, lâchant quelques jurons envers quiconque avait eu l’excellente idée de verrouiller la porte après son passage. Ses gestes deviennent de plus en plus violents à mesure que son anxiété se fait sentir. Il croit rêver quand il entend une voix au loin mais dans son désespoir, il est prêt à s’accrocher à un rivage. « Je suis là, je suis coincé. Aidez-moi s’il vous plait. » Hwan n’est pas assez attentif pour reconnaitre le timbre familier.

« Tu vas pas m’abandonner, hein… » gémit-il presque contre la porte que ses poings fermés avaient martelé pendant de longues minutes avant cette arrivée presque miraculeuse. Hwan n’y croyait plus, c’était surement le manque de sommeil et de contact avec le monde ces derniers temps qui le rendait aussi sensible, mais il ne supporte plus d’être enfermé dans cette salle, encore moins seul. Il a tant besoin d’air, d’observer le ciel au-dessus de sa tête. Hwan entend les pas s’éloigner de lui, son unique espoir, il veut y croire à sa chance et son esprit cogite toujours à la recherche d’un visage à poser sur le son si familier de cette voix. Un souvenir lointain, il en est certain.

Les minutes passent, elles semblent presque plus longues que celles passées, parce qu’à présent il attend réellement le retour de quelqu’un et c’est enfin le cas quand il entend le bruit d’une clef qu’on enfonce dans la serrure, rapidement suivi par le cliquetis si rassurant. Le soulagement détend les traits de son visage alors que la porte s’ouvre.

Enfin.

« Merci, merci… » répète-t-il, le souffle court, et quand enfin il hausse la tête c’est pour retrouver un visage du passé. « Jun. » Un sourire vient éclore sur ses lèvres, timide mais enchanté. « Toujours à me sauver, décidément. » Il rit de lui-même et de sa maladresse, il se souvient des étés d’avant, quand ses séjours à Busan étaient plus fréquents, le jeune homme avait toujours été une sorte d’ange gardien, toujours là quand il le fallait.