let's build a castle of our own.

Les vrais conneries et les fausses idioties. Les yeux braqués plus loin que l'horizon, ils effleurent les étoiles du bout des doigts et sourient à la lune, ronde et moqueuse.  Comme si du tracé des doigts, le monde réside aux creux des mains, que ça leur suffit pas. Ils avaient pas la dernière console, les jeux de l'année. Les vêtements de marque, ni du caviar sur la table. Mais ils étaient heureux, putain d'heureux. Il n'avait jamais fait aussi chaud que cet été là. A moins que ce soit ce souvenir inlassablement répété qui en avait brûlé ses pensés et rongé sa conscience.


On aura jamais parlé de son père, du vrai, du grand Alvarez. On dit qu'il est un bâtard, un fils de chien. On dit aussi qu'il assuma rien. On dit beaucoup de choses, dans le peu de famille sur le sol coréen. On le murmure le plus souvent, pour pas recevoir ce regard qui veut tout dire mais qui répond à rien. Y a plein de rumeurs sur les origines enfouies des enfants Alvarez, les cubains rejetés par la Havane elle-même. A moins que ce ne soit sa mère qui, par sa fuite, aura rejeté toute connexion avec le pays de son enfance. Et à choisir, il a choisi sa mère. Il a choisi de pas poser de question, parce qu'elle a forcément ses raisons. Parce que dans ce regard qui coupe le souffle, il y lit la blessure trop profonde, celle qu'on ne doit pas rouvrir, pas même effleurer après des années.

Busan les a accueilli, la tante de sa mère et son petit appartement partagé avec ses cousins. De vagues souvenirs pourtant, il se souvient des nuits dans un lit de deux pour quatre enfants. Il se souvient de l'uniforme qu'on lui a forcé à porter, d'une langue qu'il a dû apprendre. Ils ont grandi en partageant deux cultures.

Le premier appartement, le clapier. Le placard à balais. Il a joué au baby-sitter, il a pas vu beaucoup les bancs du lycée à une époque. Il a entraîné sa petite soeur dans ses expériences risquées. Et p't'être qu'au fond, tout ça c'est sa faute. P't'être qu'il lui a donné un si mauvais exemple que ce type était pas aussi pire qu'il l'aura décrit. Elle aura donné sa vie pour lui, sauf qu'il en a pas vraiment voulu et celui qu'on appelle en pleine nuit, c'est Nino. Lui qui l'a retrouvé, lui qui s'est promis de plus jamais laissé un mec l'approcher. L'ironie, la vie, l'humour étrange aura voulu que neuf mois après, y a eu ce môme. Et là, y a fallu trouver de l'argent.

L'idée est partie de rien, d'une bouteille presque vide. D'un rire et puis d'un silence. La vie, c'est un peu chacun sa merde. Et lui, il s'occupe suffisamment de ceux qu'il apprécie pour se soucier du monde. Ce monde qu'il a voulu un jour entre ces mains, il a compris appartenir à d'autres. C'est simple en fait. C'est facile quand on veut. Quand on veut, on peut, tu vois ; suffit juste de le voler.